Ça fait maintenant plus d’un mois que j’ai laissé la Géorgie et son atmosphère des plus authentique et particulière… J’en suis presque un peu nostalgique… Voir totalement… Pourtant je suis toujours sur les routes et bien plus que je ne l’ai été lors de mon séjour en Géorgie, ça me fait d’ailleurs énormément de bien… Ce pays, comme je l’ai répété une bonne centaine de fois, m’a énormément marqué mais ce n’était pas vraiment propice à la moto, très petit et avec un nombre restreint de routes… Mais alors pourquoi ai-je autant envie d’être Là-bas bien plus qu’Ici, à Budapest, pourtant très belle ville, d’où j’écris ces quelques lignes? Je me suis posé la question et ce qui m’a finalement amené sur la voie de cette réflexion, c’est un fait particulier que je voulais essayer de développer ici… Un peu chaotiquement peut-être et bien trop à chaud sûrement mais tu m’en excuseras car au fond j’avais envie d’ouvrir l’ordinateur et poser mes doigts sur une réflexion qui ne sortira éventuellement que de cette manière…
C’est vrai, après avoir passé deux mois dans des pays d’une richesse humaine déconcertante, comme la Turquie, la Géorgie ou l’Arménie, je me suis retrouvé à traverser d’autres types de richesses, disons, plus matérielles, à travers l’Ukraine, la Pologne, les Pays Baltes, la République Tchèque, la Slovaquie et maintenant la Hongrie… La distinction m’a paru forte entre ces deux étapes de mon voyage… Si forte qu’elle a même remis un tantinet en question le sens que je porte à ce type de roadtrip et l’intérêt que j’y trouve…
Les deux premiers mois de mon voyage ont été notamment marqués par la rencontre d’autrui, de l’humain qui occupe les vallées turques ou les campagnes géorgiennes… Des hommes, oui, et des femmes, certes, qui ne voient pas en toi qu’un simple porte-feuille rempli ou un énième touriste… Pour eux tu es avant tout un étranger, sans connotation négative, un hôte qu’il faut accueillir et d’une certaine manière découvrir… Arriver dans des petits villages turques sur ta moto qui ne passe pas inaperçue, tes habits d’un autre monde, ta GoPro qui émerveille et j’en passe, c’est te rendre compte que c’est avant tout la curiosité de l’inconnu qui fixe tous les regards sur toi… Eux, s’interrogent sur qui tu es mais sont avant tout ravis… Ravis de te voir, toi, un étranger, venir découvrir leur pays, leur paysage et être venu jusqu’à leur petit village… Village dans lequel il n’y a presque rien mais en même temps imprégné d’un tout… Car ici, ce sont les gens qui remplissent un vide apparent… Ils sont chaleureux, accueillants, souriants et généreux… Au final, tu vas savourer une simplicité humaine et matérielle si suffisante qu’elle te fera oublier tout le reste… Des sourires généreux, des gestes chaleureux, des regards rassurants et tout ceci accompagné par une simple tasse de thé chaude ou de gorgée d’eau bien fraiche… Mais c’est bien assez pour te sentir comblé et serein… C’est l’un des aspects que j’ai adoré notamment en Turquie…
En Géorgie ou en Arménie, te rendre dans les campagnes et dans les villages, c’est te retrouver au Moyen-Âge… Des champs de légumes chaotiques à la place des pelouses parfaitement tondues des villas occidentales, des pioches et des ânes maintenus par des paysans, hommes, femmes et enfants, au lieu des SUV étincelants sous un fond de pauvreté qui te saute aux chevilles… Il n’y a rien d’autre que des maisons presque en ruines, pas un petit café, pas un petit bistro pour te vendre une boisson, seulement la pièce abritant le four à pain fournissant le village… En ces moments, tu ne manques de rien, tu es content de trouver un bout de pain et un peu de fromage pour te remplir le ventre et c’est bien suffisant… Tu savoures cette simplicité si loin de l’abondance excessive de ton quotidien…
Depuis que j’ai débarqué à Odessa, j’ai retrouvé le Macdonald, le Burger King, les grands centres commerciaux, le Starbucks qui ne m’avaient pas du tout manqué puisque je n’y mets pas les pieds… Mais ils marquent le paysage et au fond un style de vie… La consommation… C’est moche, mais tu retombes dedans, d’un coup en oubliant ce qui t’avait simplement comblé… Le petit pain avec le bout de fromage de chèvre ne sont plus là, puisqu’à côté tu as tout… Tout ce que tu peux bien vouloir et même bien plus… C’est pourquoi tu ne sais plus ce que tu veux manger ou boire, t’es perdu, je me suis retrouvé perdu face au choix… Je veux juste une soupe ou une salade avec de l’eau ou un bout de pain… Mais tu te rends compte que ça ne te suffit plus et que l’abondance de l’offre t’amène à vouloir toujours chercher autre chose que ce qui t’est proposé ou simplement plus que ça… Car on te donne le choix… De plus, te poser sur le trottoir pour manger ton bout de pain est remplacé par l’envie d’un lieu cosy que tu recherches éperdument… Aïe, c’est foutu… Consommer est au fond si plaisant… Mais je n’en ressentais pas du tout le besoin quand je ne pouvais pas le faire… Au contraire, tu te sens bien assis sur un trottoir à grignoter du pain « aromatisé »… La dernière fois que je l’ai fait c’était en Géorgie, il y a maintenant un mois et demi, et ça me manque…
Cette différence, ce contraste m’a amené à me questionner car au fond je ne me suis plus vraiment senti satisfait par ce que j’étais en train de découvrir et de vivre une fois quitté l’Ukraine, mais surtout la Géorgie… Bon, heureusement, quand tu roules au fin fond de la Lituanie, tu peux te retrouver avec l’absence de choix ou même l’absence de tout, ce qui te ramène à tes besoins de base, manger, peu importe quoi, et boire… Ça m’est d’ailleurs arrivé de ne trouver qu’un petit pain ficelle et une banane comme repas et de le manger assis par terre devant la petite échoppe… Mais sinon tu retrouves toujours la même chose, que ce soit humainement, architecturalement ou bien au niveau des biens de consommation… Au final, tu n’es jamais vraiment perdu et quasiment toujours porté par une sorte de confortable vacance consommatrice… Ok, je schématise beaucoup et réduis à une simplicité un monde bien complexe et différent par mon simple et modeste vécu, mais j’ai eu cette impression…
Je ne sais pas trop comment le formuler, mais depuis que je suis entré en Pologne, j’ai l’impression d’avoir traversé un « bloc », car presque tout se ressemble… Que ce soit la « sympathie » des gens, hum hum, les paysages beaux mais se ressemblants bien trop, l’organisation des villes avec des centres historiques remplis de touristes et pour certains construits à l’identique… Une nourriture qui se veut particulière et singulière même si tu as l’impression de « découvrir » toujours les mêmes plats sous tes yeux et au fond de ta bouche… Le nom change, bien… Mais sinon? C’est un peu comme être face à des nuances d’une même couleur et non à des couleurs différentes…
Les cultures particulières ont simplement foutu le camp pour laisser place à celle de la bière pas chère et à la musique sans goût et sans identité sauf celle de la bringue alcoolisée… En ville, tu retrouves des filles qui n’ont plus aucun charme sauf celui de l’économie d’habits et de l’abondance de maquillage, sans parler des hommes à la volonté première d’être souriant et étincelant dans leur t shirt et short moulants en regardant attentivement qui regarde le magnifique effet Colgate… Du coup, bof, je n’y vois plus l’intérêt… Le paysage médiéval géorgien et ses vaches se baladant dans les rues me manquent bien trop quand je vois le vomis par terre tout en respirant l’odeur de pisse toute fraiche…
Du coup j’ai envie d’aller ailleurs, dans un endroit qui soit à l’opposé de ceux-ci, peut-être même radicalement différents… Besoin de diversité, de contraste, de différence avec mon chez moi… Non une plate copie d’un mode de vie qui se ressemble bien trop pour n’en trouver que le simple plaisir de la pause vacance à siroter une boisson trouvée au fin fond d’un menu qui lui s’est trouvé sans fin…
En fait, j’ai envie de me casser… Prendre ma moto et me perdre loin de tout cela… Mais dans cette région du monde, ça me semble bien difficile finalement…